Plus de 52 % de la population helvétique est favorable à des restaurants sans fumée, selon un sondage publié par la "SonntagsBlick". La part de partisans de l'interdiction grimpe même à plus de 70 % pour les bâtiments publics.

Le sondage représentatif a été réalisé en fin de semaine, après la décision du Grand Conseil tessinois d'interdire de fumer dans les restaurants, les bars et les discothèques. Cette modification de la loi paraît largement soutenue, à tout le moins en Suisse romande et en Suisse alémanique, où 603 personnes ont participé au sondage.

Si elles soutiennent à 52,2 % l'idée d'établissements publics non fumeurs, les personnes interrogées sont encore plus catégoriques s'agissant des bâtiments publics comme les gares ou les administrations communales : 71,7 % estiment que les volutes de cigarettes, cigares et autres pipes devraient y être proscrites.

Il devient de plus en plus difficile d'en griller une dans l'espace public helvétique. Dès le 11 décembre, il faudra jeter son mégot avant d'entrer dans les trains, bus et bateaux des compagnies suisses. La consommation de tabac sera également interdite dans les locaux mal aérés et dans les gares. (TSR)

Donc, qu'en penser ? Avant tout, rappellons le paradigme anarchiste par opposition au paradigme autoritaire mentionné ci-dessus : aucune activité n'est obligatoire, et ne sont interdites que les activités qui constituent une agression, autrement dit, un non respect du droit de propriété d'une autre personne. Donc, de même que chacun a le droit (au sens anarchiste et non légal) de consommer de l'alcool, de l'héro ou de la beuh, voire du café, chacun a aussi le droit de fumer de la clope si ça l'amuse. Toutefois, la fumée passive, c'est à dire le fait de fumer une clope à promiximité de quelqu'un qui ne le souhaite pas, constitue une nuisance (habits qui puent, plus de difficulté à respirer, etc.) voire un danger accru de développer une maladie mortelle. Le fait qu'il s'agisse d'un risque ne change strictement rien au problème : forcer quelqu'un à jouer à la roulette russe est bien une agression.

Par contre, jouer volontairement à la roulette russe n'est une agression contre personne. Autrement dit : ne pas fouetter les gens est la règle, mais le club sado-maso est l'exception, puisqu'ils sont consentants.

Ayant compris cela, abordons la question de l'interdiction dans les lieux dits "publics". Dans les lieux publics, dans le sens de financés par l'argent du contribuable, c'est la règle de non-agression, et donc interdiction de fumer qui doit prévaloir. Dans les bâtiments publics, dans le sens que vous pouvez être obligés de y aller, ou n'avoir d'autre choix que de y aller, telles gares, universités, hôpitaux, administrations, écoles, etc. aussi, bien entendu.

Passons aux exceptions : faire un wagon fumeur dans les trains peut en être une. D'autant plus que le nombre de fumeurs allant agresser les non-fumeurs en allant fumer dans les wagons non-fumeurs risque d'augmenter par l'abolition des wagons fumeurs (même avec les wagons fumeurs ça arrive/arrivait parfois!).

Se pose la question des restaurants et autres bars. La règle, c'est à dire l'interdiction, devrait prévaloir, à moins que le restaurant/bar se constitue en exception. La situation actuelle semble plutôt le contraire, avec une vaste majorité de bars fumeurs et quelques exceptions non-fumeurs. Il "faudrait"* une inversion de ces proportions. Une loi interdisant la fumée dans les lieux publics, si elle ne semble pas a priori la solution la plus libérale au problème, n'est donc pas aussi anti-libérale qu'elle y paraîtrait : elle n'est pas plus choquante que les lois déjà existantes qui interdisent de façon générale d'autres formes d'agression comparable. Le sondage semble révéler qu'une majorité de la population serait favorable à l'inversion de proportions que je mentionne. Il est dommage que le seul moyen d'y parvenir semble actuellement être une loi, mais peut-être que la population à tellement pris l'habitude de s'en remettre à la politique qu'elle ne se bat plus pour défendre ses préférences de façon libérale-anarchiste-compatible, création de bars-non-fumeurs, boycott des bars fumeurs, etc. En fin de compte, le problème semble donc plus sociologique (l'acceptation sociale d'un produit très addictif et extrêmement nocif) que politique.

* Selon la théorie libérale-anarchiste pure, une société est libre si le droit de propriété est respecté (ce qui rélève du droit et non de la morale). Selon ma morale à moi, je préfére une sociéte "saine" à une société où les gens passent leur temps à jouer à la roulette russe ou dans des clubs sado-masos.